Réaction à l’article :
Peut-on supprimer les niches fiscales en France ?
de Guillaume Guichard
Paru dans Le Figaro le 26 mars 2018
Arrêtons de vouloir supprimer à tout prix les niches fiscales. Evitons ce discours démagogique et analysons-les avec sérieux. Si certaines sont inefficaces, d’autres sont indispensables à l’économie française, et pas seulement pour la défiscalisation.
A une période où notre ministre des finances, Bruno Lemaire, annonce qu’il veut que l’épargne des français contribue davantage au financement de l’économie et que notre ministre des outre-mer, Annick Girardin, veut de nouveaux dispositifs « ciblés et adaptés » d’aides aux entreprises ultramarines, on a souvent tendance à oublier l’essentiel. Analyse par DOM COM INVEST.
L’outre-mer ou l’immobilier ont besoin des niches fiscales
Certes, il y a trop de niches fiscales et certaines seraient à supprimer, car elles sont inefficaces. Mais il en existe d’autres qui contribuent réellement au financement de secteurs clefs de notre économie. Il faut donc, au contraire, les utiliser pour inciter les français à orienter leur épargne vers l’économie réelle, dans une optique de défiscalisation.
Le premier exemple est celui de la construction de logements neufs dont la pénurie est régulièrement mise en lumière. Sans incitation fiscale, comme le dispositif Pinel, combien seraient sortis de terre ces dernières années ?
Le second exemple concerne l’outre-mer. Les avantages fiscaux permettent aux forces vives de ces territoires de bénéficier des aides à l’investissement du dispositif Girardin depuis plus de 30 ans. Alors que l’outre-mer subit des difficultés croissantes, comment les entreprises locales pourraient rester compétitives sans ces aides ?
Quand la défiscalisation devient une vraie aide pour l’économie réelle
Autre exemple de niche de défiscalisation : comment les entreprises pourraient-elles se passer des apports en capitaux des épargnants français ? On vient de supprimer l’ISF et son milliard d’euros généré chaque année grâce au dispositif TEPA ISF au profit de ces entreprises. Et, en guise de réponse, le gouvernement ne fait qu’augmenter l’avantage fiscal Madelin, prévu à l’article 199 terdecies-0 A du CGI, de 18 % à 25 %, pour toute souscription au capital des PME.
Certes, cette augmentation va dans le bon sens. Mais elle n’aura que peu d’effets à cause du plafonnement des niches fiscales*. Au Royaume-Uni, par exemple, le plafond des réductions d’impôt pour l’investissement dans l’économie réelle est fixé à 500 000 livres sterling. Nous ne sommes pas dans la même catégorie !
Les avantages offerts par ces trois niches fiscales sont pourtant un investissement très rentable pour les finances publiques. Au final, elles ne s’avèrent pas très coûteuses, étant synonymes de croissance, de création ou de maintien de l’emploi.
Oui, il faut supprimer les niches fiscales qui ne bénéficient pas à l’économie réelle (et elles sont nombreuses). Mais il faut d’abord libérer les français qui paient l’impôt en supprimant leur plafonnement, totalement improductif pour notre économie. Alors que notre pays est champion d’Europe des prélèvements sociaux et fiscaux, il est urgent que le gouvernement prenne conscience que nos concitoyens sont prêts à investir en masse dans l’économie réelle. Mais pour cela, ils ont besoin d’un signal fort.
* La loi de finances 2009 limite dorénavant les avantages fiscaux à 10 000 € au total ou 18 000 € pour les investissements outre-mer et les SOFICA.